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Place des Psychiatres dans l’offre de psychothérapie :

La consultation psychiatrique est psychothérapeutique.

Docteur Pierre STAËL , Psychiatre.

 En ce qui concerne la dimension d’emblée psychothérapeutique de toute consultation psychiatrique, nous n’allons pas nous lancer dans une longue démonstration de ce dont tout psychiatre est convaincu de par sa conception même d’une médecine et psychiatrie humanistes, confortée par ailleurs par son expérience et sa pratique quotidienne.

Nous allons plutôt rappeler pourquoi la consultation psychiatrique ne peut pas être autre que psychothérapeutique. Ou plus exactement la consultation du psychiatre, c’est-à-dire celle pratiquée par un psychiatre.

En effet, les psychiatres ont la spécificité d’avoir une triple formation d’une part de médecin, d’autre part de spécialiste à la clinique psychiatrique mais aussi aux différentes approches psychothérapiques et à la pratique d’une ou plusieurs modalités de celles-ci. Et c’est ce positionnement en tant que psychothérapeute qu’adopte d’emblée le psychiatre dès la première consultation qui proposera et permettra au patient de parler, non pas uniquement de ses symptômes ou de sa maladie mais d’évoquer sa ou ses souffrances autant psychiques qu’organiques et donnera également à ce dernier la possibilité, s’il le souhaite, de parler de lui et de sa vie. Pour les psychiatres pratiquant aussi ou surtout les thérapies cognitivo-comportementales, ils se situent également d’emblée dans la perspective de proposer à leurs patients une TTC, c’est-à-dire une thérapeutique psychothérapique.

 C’est cette écoute spécialisée, que n’ont pas ou peu souvent les autres médecins, qui permettra de  signifier au patient d’une part que ses souffrances s’inscrivent non pas dans une instantanéité accidentelle ou étrangère à lui mais dans le déroulement et l’inscription de son histoire de vie personnelle et singulière avec une empreinte souvent lourde dans sa vie actuelle et des répercussions possibles voire angoissantes quant à son futur et d’autre part qu’il existe des démarches psychothérapeutiques à côté de l’utilisation éventuelle des médicaments. Car la simple écoute, fût-elle bienveillante et empathique ne suffit pas à elle-même pour constituer un processus psychothérapeutique et permettre au patient d’y entrer. Il faut pour cela cette écoute spécialisée de psychothérapeute à laquelle les psychiatres sont spécifiquement formés. Ainsi, la dimension

psychothérapique est consubstantielle à la consultation psychiatrique dont elle constitue une partie intégrante et indissociable. Elle est la marque de la spécificité de notre spécialité qui distingue la psychiatrie des autres spécialités médicales.

 Cette amorce de prise en charge psychothérapeutique dès la première consultation pourra ensuite être continuée par ce même psychiatre soit en monothérapie de façon structurée (psychothérapie analytique, cognitivo-comportementale, systémique, familiale) ou associée à un suivi médicamenteux soit sous forme de psychothérapie d’accompagnement ou de soutien, lors de suivis plus centrés sur une thérapeutique médicamenteuse plus ou moins lourde comme auprès de névroses graves ou dépassées ou de psychoses sévères, mais également auprès de patients ne pouvant pas ou ne souhaitant pas entrer dans un processus psychothérapique structuré ou au long cours.

 La prise en charge psychothérapeutique pourra également être déléguée dans un second temps et poursuivie soit par un autre psychiatre soit par un psychothérapeute non psychiatre, le positionnement initial des premières consultations ayant préparé le patient à une telle possibilité. Mais, l’apocope « PSY », si souvent utilisé pour désigner toute personne travaillant dans le « psychologique » ou le « psychique », recouvre en fait des intervenants très différents pouvant n’être ni psychiatres, ni médecins, ni même psychologues. Or, les psychothérapies pratiquées par des intervenants non psychiatres, même si ceux-ci se devraient d’être formés et qualifiés au niveau universitaire, posséder une expérience clinique et être redevables, si possible, d’obligations déontologiques analogues à celles des médecins, n’ont pas la dimension médicale et globale de celles du psychiatre et ne sauraient donc se confondre avec elles.  Et à notre avis, elles devraient se situer dans le cadre d’une indication et d’une prise en charge conjointe avec un psychiatre garant du suivi psychiatrique ou avec un médecin généraliste pouvant se prévaloir de la compétence souhaitée. En effet, les psychothérapies sont des modalités de soins et l’indication éventuelle de tel ou tel type de psychothérapie nécessite une démarche clinique et l’établissement d’un diagnostic médical et psychiatrique qui relèvent de la seule compétence des médecins psychiatres ou d’un praticien généraliste suffisamment formé à cet effet.

Pour conclure, les Psychiatres, malgré ce qui est colporté ou souvent annoncé à tort dans les médias, ont donc toute leur place dans l’offre de psychothérapie, d’autant que leur qualité de médecins spécialistes et de plus conventionnés pour la quasi- totalité, permet aux patients de bénéficier, s’ils le souhaitent, d’une prise en charge par l’Assurance Maladie.

 

Docteur Pierre STAËL 

Psychiatre.

 

Bibliographie :

  • Widlocher D, Marie-Cardine M, Braconnier A, et al. (2006) : Choisir sa psychothérapie : les écoles, les méthodes, les traitements. Paris : Odile Jacob.

  • Gabbard, G.O.;2009 Textbook of psychothérapeutic treatments. Washington DC, London, England: American Psychiatric Publishing inc.

  • Psychotherapeutic and psychosocial interventions and endophenotypes on bipolar disorders N.Correard, S.N Elissalde, J-M Azorin, E.Fakra, R.Belzeaux Encephale. 2012 Dec;38 Suppl 3:S110-5. doi: 10.1016/S0013-7006(12)70088

  •  Commission de l’exercice privé du SPF : psychiatrie et psychothérapie : la psychothérapie du psychiatre. Paris, La LETTRE de Psychiatrie Française N°57/96

  •  Staël Pierre, Vasseur Christian : la pratique des psychothérapies. Association Française de Psychiatrie. La LETTRE de Psychiatrie Française N°223

  •  Conseil du SPF : quel avenir pour quelle psychiatrie en France. La LETTRE de Psychiatrie Française N°206

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